Loi Omnibus : avancer quoi qu’il arrive !

Commission européenne
La loi Omnibus a été vécue, comme un soulagement pour certains, comme un retour en arrière pour d’autres. Les textes réglementaires évoluent mais les enjeux de transition, d’atténuation et d’adaptation restent plus que jamais d’actualité. Car les risques (économiques, environnementaux, sociaux et sociétaux) liés au changement climatique demeurent et ne feront que s’amplifier dans les années à venir.
L’ambition de départ de la CSRD était de permettre aux entreprises d’avoir un cadre commun pour accélérer la transition et un reporting standardisé pour faciliter la comparaison des engagements pris. Largement critiquée pour sa lourdeur, sa complexité, le temps et les ressources à y consacrer, la CSRD aura au moins permis de faciliter le dialogue entre les directions RSE et financières et d’engager une prise de conscience au sein des COMEX et Conseils d’Administration. Elle a également enclenché une réflexion dans les organisations sur les modèles d’affaires, les chaînes de valeur, la gouvernance (ESRS 2), la stratégie climat à adopter (ESRS 1). Même si les exigences de la loi Omnibus semblent revues à la baisse et que la commission avec un possible appui technique de l’EFRAG n’a pas encore statué sur le nombre de data points et le contenu des ESRS, il convient de conserver un certain nombre de ces bonnes pratiques.
Avec un délai de 2 ans supplémentaire (Stop the Clock) d’obligation de reporting CSRD/taxonomie pour les entreprises de la vague 2 (celles soumises en 2026 sur l’exercice 2025 et dont désormais les seuils ne sont plus + de 250 salariés mais + de 1000, cotées ou non), la loi Omnibus devrait permettre d’appréhender plus sereinement les enjeux RSE essentiels à chaque organisation. Mais attention à ne pas considérer ce report comme une hibernation pour se réveiller dans deux ans, en vue d'un exercice de pure conformité réglementaire. Au contraire, on ne saurait leur recommander d’utiliser ce temps pour redonner à la RSE sa dimension stratégique et se concentrer sur le passage à l’action.
En effet, sans plan de transition, difficile (voire impossible) pour les entreprises de demeurer résilientes, compétitives, pérennes. La récente étude du Boston Consulting Group, en partenariat avec le World Economic Forum sur le coût de l’inaction climatique indique "qu’entre 5 % et 25 % des bénéfices des entreprises d’ici 2050 sont menacés par les risques matériels du changement climatique. Les entreprises les moins préparées à l’évolution des politiques climatiques pourraient être fortement pénalisées. À titre d’exemple, une tarification effective du carbone pourrait à elle seule entraîner des coûts supplémentaires allant jusqu'à 50 % de l'excédent brut d'exploitation (EBITDA) dès 2030 pour les forts émetteurs".
Pour les entreprises de moins de 1000 collaborateurs, il est également fortement recommandé de faire un reporting volontaire (le fameux VSME - Voluntary Standard for non-listed micro-, small- and medium-sized undertakings) et de conserver l’approche de l’analyse de double-matérialité qui permet d’identifier ses impacts majeurs (matériels, financiers …), ses risques et opportunités majeurs et de conjuguer les enjeux business avec ceux de l’ESG. Ce reporting doit être considéré avant tout comme un outil de pilotage pour faciliter la transformation des modèles d’affaires, accélérer la transition et s’inscrire dans une démarche d’amélioration continue. Il reste un moyen efficace de centraliser les informations pour répondre aux attentes des donneurs d’ordre et des financeurs.
Le calendrier de l’application de l’Omnibus est pour l’heure encore incertain. Il s'agit pour l’heure d'une proposition qui doit encore être approuvée par le Parlement européen et le Conseil européen, avant une transposition au sein des Etats membres en droit national d’ici à la fin de l’année dans le cadre d’une procédure accélérée. Cette phase d’incertitude sur le calendrier doit permettre de se recentrer sur la stratégie et les actions. Comme le dit très justement Arnaud Hermann, fondateur d’Ecolearn, jusqu’à présent, « la RSE n’est pas parvenue à percer le plafond de verre du business ». Voyons l’Omnibus comme une opportunité de crever ce plafond et ce, de manière irréversible.
Cette chronique a été rédigée le 8 mars. Ces éléments ne sont pas figés et sont à prendre au conditionnel car ils risquent d’évoluer fortement au cours des semaines à venir.
Adeline Labelle, Directrice des Opérations et Conseil RSE - People4Impact