La crise du bio comme opportunité future pour le bas-carbone en agro-alimentaire ?

Depuis le début des années 2000, la promesse de l’alimentation bio était alignée avec les angoisses du consommateur. Promesse et angoisses se rejoignaient sur l'absence de résidus de pesticides de synthèse, l’utilisation d’engrais « naturels », le bien-être animal, la prise en compte de la totalité des activités d’une exploitation dans la labélisation, etc.

Les consommateurs qui disposaient d’un surplus de pouvoir d’achat disponible ont vu dans les promesses du bio une réponse à leur désir de consommation responsable, et la demande a tiré l’offre pendant une vingtaine d’années. Puis arrive le Covid et soudain, chacun mesure l’enjeu de la souveraineté. Le local prend le pas sur le bio, et le bio, pas toujours local en alimentation, voit sa promesse se brouiller, et commence à s’éloigner des angoisses renouvelées des consommateurs.

En 2023, les Français ne consomment déjà plus tout à fait comme avant le Covid, la végétalisation de l’assiette est en cours, et près de 45% des Français ont engagé une forme ou une autre de transition alimentaire (source : Fondation Jean Jaurès et L'OBSOCO, "La France à table (1/2) : les mutations de l'alimentation" ), cherchant à rapprocher leur alimentation des limites planétaires. Et malheureusement pour elle, l’alimentation bio n’a pas encore su renouveler sa promesse, ce qui pèse sur son attrait pour les consommateurs.
 

Les consommateurs, eux, sont soumis à un flux constant d’informations anxiogènes sur le dépassement des limites planétaires et le changement climatique, et ils ne voient plus dans le bio de promesse qui vienne s’aligner sur leurs angoisses. Pour au moins une partie d’entre eux, l’alimentation bio a perdu de sa légitimité en tant qu’achat responsable. Le bio n’est pas moins bon qu’auparavant, mais sa promesse s’est déconnectée des attentes et des angoisses de consommateurs.

Mais alors, que recherchent les consommateurs souhaitant allier consommation responsable et plaisir alimentaire déculpabilisé ?

La réponse à cette question reste à construire par les industries agro-alimentaires, mais nous pouvons essayer d’estimer le potentiel de croissance d’une alimentation qui répondrait à ces angoisses renouvelées des consommateurs, à travers 2 exemples :

1.     La croissance passée du bio : d’un marché alimentaire en France de 4,3 Md€ en 2012, le marché passe à 12,8 Md€ en 2020 soit une croissance moyenne de 30% par an (source : Agence française pour le Développement et la Promotion de l'Agriculture Biologique)

2.     En dehors des produits Bio, les marques d’alimentation et de boissons les plus durables¹ ont une performance plus de 3 fois supérieure à la moyenne du marché, en France et sur 5 ans (2017 – 2022) (source : EY, "Performance des marques durables en grand consommation")

Parce que les consommateurs répondent positivement aux promesses de durabilité, le potentiel de croissance et de performance à long terme pour les filières et les industries agro-alimentaires existe, est considérable, mais reste à saisir. Ces deux exemples doivent inspirer les industries agro-alimentaires qui cherchent à innover et à se positionner sur un marché en recherche de plaisir et de sens. L’entreprise gagnante de demain aura engagé une stratégie RSE et une trajectoire de réduction des émissions de carbone ; et saura communiquer sur ces sujets auprès des consommateurs pour remporter leur adhésion.

(1)  Produits affichant le plus de signes de durabilité des produits : on pack ou en magasin ou accessibles en 1 clic, via des labels ou scores ou équivalents, et sans focus sur le bio. 

Auteur : Frederick B., Expert People4Impact

Frederick Basset accompagne les TPE et PME de la filière agroalimentaire dans leur transition écologique et énergétique.